La diabétologie

L'unité d'exploration technologique en diabétologie

Cette unité a pour vocation de mettre en pratique les nouvelles technologies disponibles en diabétologie et en particulier la mesure continue du glucose. Cette technique fournit toutes les 1 à 5 minutes une mesure de la concentration de glucose dans le tissu interstitiel. Utilisée depuis une dizaine d’années, elle s’est développée parallèlement aux avancées technologiques : capteurs de glucose plus fiables et mieux tolérés sur le plan cutané, émetteurs moins encombrants, liaison non filaire avec le récepteur, possibilité d’utiliser les pompes à insuline comme récepteur avec un affichage en temps réel... Elle permet de mettre à jour des variations glycémiques non révélées par l’auto-surveillance glycémique habituelle qui ne fournit que quelques mesures glycémiques par jour.

1) Qu’est ce que la mesure continue du glucose ?

Les appareils de mesure continue du glucose (MCG) utilisent un capteur qui mesure le taux de glucose dans le tissu sous cutané (glucose interstitiel). Il s’agit d’une petite électrode de 5 mm de long environ qui est insérée sous la peau pour une durée de 5 à 10 jours. Le capteur est fixé à un transmetteur qui recueille les mesures toutes les 1 à 5 minutes. La récupération des données du capteur se fait soit à la fin de l’enregistrement par téléchargement sur un ordinateur, soit en direct vers un petit moniteur porté par à la ceinture.

Que mesure le capteur de glucose sous cutané ?

Le capteur sous-cutané ne mesure pas directement la glycémie veineuse ou capillaire mais le taux de glucose dans le liquide interstitiel. Il existe un délai entre ces 2 mesures : la valeur du glucose interstitiel est le plus souvent retardée de 5 à 15 minutes par rapport à celle de la glycémie capillaire. Un écart entre les deux mesures peut donc être observé, en particulier dans les périodes de forte variation glycémique. Quand la glycémie augmente rapidement, le taux de glucose mesuré par le capteur peut être inférieur à la glycémie. A l’inverse, quand la glycémie baisse rapidement, le taux de glucose mesuré par le capteur peut être supérieur à la glycémie. Ce délai doit donc être pris en compte dans l’interprétation des résultats.

2) Pourquoi et comment la mesure continue du glucose est-elle utilisée ?

La MCG permet de mettre à jour des variations glycémiques qui peuvent être ignorées par la mesure discontinue de la glycémie, notamment après les repas et la nuit. Elle permet ainsi de préciser les profils glycémiques dans les 2 à 5 heures après les repas (importance du pic postprandial, chute glycémique à distance). Elle est particulièrement utile pour révéler des hypoglycémies nocturnes non ressenties ou pour expliquer la cause d’une hyperglycémie au réveil.

 

 

Figure : exemple de tracé de mesure continue du glucose (figure du haut) avec les doses d’insuline administrées par une pompe à insuline (figure au-dessous). On peut visualiser la chute du taux de glucose vers 1h, suivie d’une hyperglycémie sur le reste de la nuit.

On distingue deux types d’enregistrements : les holters glycémiques et les enregistrements en temps réel ou MCG-RT

2-1) Les holters glycémiques : l’utilisateur n’a accès à aucune mesure en temps réel. Le transmetteur stocke les signaux émis par le capteur pendant 5 à 6 jours. Les données du transmetteur sont ensuite téléchargées dans un ordinateur, permettant une analyse a posteriori du profil glycémique et des conduites du patient (adaptation des doses d’insuline, corrections des hypoglycémies, adaptation à l’effort etc…). Ces enregistrements sont donc à visée diagnostique et sont utilisés sur de courtes périodes (5 à 12 jours).

2-2) Les enregistrements en temps réel ou MCG-RT : l’utilisateur a accès aux mesures en temps réel. Le transmetteur reçoit et traite les signaux émis par le capteur avant de les envoyer par radiofréquence vers un petit moniteur porté à la ceinture ou sur un smartphone. Certaines pompes à insuline peuvent servir de moniteur et le résultat de la mesure du glucose apparaît alors sur l’écran de la pompe.
L’écran du moniteur affiche le taux de glucose toutes 1 à 5 minutes ainsi que la courbe glycémique sur plusieurs heures et sa tendance immédiate indiquant si le taux de glucose augmente ou diminue. Des alarmes peuvent être programmées pour avertir l’utilisateur en cas d’hyperglycémie, d’hypoglycémie ou encore lors d’une variation rapide du taux de glucose. Certaines pompes interrompent même automatiquement l’infusion d’insuline en cas d’alarme hypoglycémique non entendue par le patient.
Après une formation spécifique à l’utilisation des données de la MCG-RT, le patient peut être à même d’adapter son traitement en temps réel. Ces enregistrements ont donc une visée thérapeutique dans sa dimension globale (adaptation du traitement et éducation). Les informations enregistrées dans le moniteur peuvent également être téléchargées, à des fins d'analyse, sur un ordinateur.
Il a été montré que l’utilisation régulière de la MCG-RT sur de longues périodes, chez certains patients diabétiques de type 1 traités par multi-injections ou pompe à insuline, permet une baisse de l’hémoglobine glyquée (environ 0,5%) sans augmentation de la fréquence des hypoglycémies. Certaines études suggèrent également une baisse du risque d’hypoglycémie.

L’utilisation de cette technique reste limitée en France car elle ne bénéficie pas encore d’une prise en charge par la sécurité sociale. Elle est de ce fait réservée à quelques patients présentant un diabète de type 1 très instable avec des hypoglycémies sévères répétées. Le coût du capteur est d’environ 10 euros par jour.

3) L’utilisation de la mesure continue du glucose au CHU de Rennes :

Pour être réellement profitable, la pratique de la MCG doit être accompagnée d’une éducation du patient et d’une analyse fine des courbes intégrant toutes les données susceptibles d’interférer avec l’équilibre glycémique (adaptation des doses d’insuline, technique d’injection, activité physique, alimentation, resucrages etc…). Pour cela, nous avons créé des outils d’éducation, de recueil de données, d’aide à la décision ainsi qu’un séjour spécifiquement dédié à l’analyse multidisciplinaire des « Diabètes Durablement Déséquilibrés (« séjours 3D »).

Les « séjours 3D »

Ils s’adressent aux patients traités par insuline dont l’équilibre est difficile (HbA1c élevée, hypoglycémies sévères ou répétées, instabilité glycémique…). Il s’agit d’une évaluation de ces Diabètes Durablement Déséquilibrés grâce à la pose en consultation d’un holter glycémique en ambulatoire pendant 5 à 6 jours. A la fin de l’enregistrement, une hospitalisation de 48 heures (du mercredi après–midi au vendredi après–midi) permet une analyse multidisciplinaire (médecin, infirmière, diététicienne) des enregistrements ainsi que des connaissances et des pratiques du patient. Une épreuve de jeûne glucidique de 24 heures évalue les besoins en insuline basale. Les éventuelles problématiques comportementales, psychiques sont abordées au cours d’une table ronde animée par une psychologue. Un entretien individuel avec l’assistante sociale peut être sollicité. Une synthèse incluant des propositions thérapeutiques précises est rédigée par l’équipe puis transmise au patient et à son diabétologue référent.

Comment participer à un séjour 3D ?

L’inscription se fait à la demande de tout diabétologue hospitalier ou libéral de l’Ille et Vilaine et des départements limitrophes.

L’utilisation des enregistrements en temps réel ou MCG-RT

Ils sont essentiellement proposés sur des périodes courtes (une à quatre semaines), l’absence de prise en charge par la sécurité sociale limitant leur utilisation à plus long terme.

Ils sont utilisés pour que le patient adapte son traitement au cours de ses activités professionnelles ou sportives. Ils permettent de visualiser en direct l’effet des resucrages et des ajouts d’insuline.Leur utilisation requiert une formation spécifique de 2 heures environ par une infirmière et un médecin.

CGM-Advisor © : une application pour smartphone

Le service développe actuellement, avec l’école Centrale-Supélec, une application pour smartphone d’aide à l’adaptation du traitement par pompe à insuline couplée à la mesure continue du glucose en temps réel. Devant l’afflux permanent d’informations transmises par le capteur, l’utilisateur hésite souvent à prendre la bonne décision et parfois il n’en prend aucune. Cette application, IPRA ©, va lui permettre de recevoir un conseil précis à partir des informations qu’il va renseigner. A la première utilisation, le patient va enregistrer ses paramètres personnels (ratio insuline/glucides pour chacun de ses repas, bolus de correction habituel, objectifs de glycémie). Puis, lorsqu’il souhaitera obtenir un conseil il rentrera successivement sur son smartphone : la glycémie ambiante, les flèches de tendances, s’il va manger ou se coucher, une éventuelle activité physique et l’heure du dernier bolus injecté. Deux cent trente-huit combinaisons de ces différents paramètres ont ainsi été générées. Chacune d’entre elles a donné lieu à l’élaboration d’un conseil précis, incluant si besoin, des messages de sécurité. Par exemple si la glycémie au coucher est > à 2.5g/l avec ↑↑, le premier conseil qui s’affiche est de vérifier la présence ou non d’acétone ; selon la réponse choisie un second conseil s’affichera.

Une base de données alimentaires et un assistant bolus ont été associés à la nouvelle version de l’application dénommée CGM Advisor ©. C’est donc un outil éducatif original et unique qui permet d’utiliser au mieux les données des capteurs de mesure continue du glucose et donc d’obtenir une meilleure stabilité glycémique. Un partenariat avec Orange healthCare est en cours afin de développer cette application.

A terme, l’objectif est d’éviter la saisie manuelle des données du capteur qui seraient directement transmises sur le smartphone.